Tag Archive: 7ème Protocole


SixthSense

Ça y est. On y arrive. La superposition du réel et du virtuel sans l’interposition du hardware. Ça vous rappelle quelque chose ? 7ème protocole, Serial Experiments Lain et tout le bazar…?

Tout ce que vous avez pu voir sur la réalité augmentée c’est du pipi de chat comparé à ce que Pranav Mistry, du MIT, a présenté en novembre 2009. Ne vous laissez pas tromper par le début de la vidéo, c’est à partir de 5:00 que ça décolle (et je ne saurais trop vous conseiller l’intégration des sous-titres – disponibles en français – car l’accent du monsieur est loin d’être oxfordien ^^).

Ce type est clairement génial. Le public ne s’y est d’ailleurs pas trompé (standing ovation à la fin).

Relents de fosse

Je reposte cette conversation qu’on a eu dans la fosse parce qu’elle était intéressante et que ce serait dommage qu’elle disparaisse dans l’oubli. J’ai viré les commentaires sans rapport avec le sujet, les fautes d’orthographe et les insultes 😀

esm.: je rêve quand même, il aura fallu Lain pour vous faire tripper cyberpunk.
lvdz.: mais non rien à voir, il aura fallu lain pour tripper sur lain
c’est beaucoup plus mystique que du cyberpunk.
tranx.: et puis bon ça fait 5 ans que je trippe dessus hein
en plus c’est vrai il y a toute une dimension mystique
qu’on ne retrouve jamais dans le cyberpunk ‘traditionnel’
alors qu’en fait le mystique s’inscrit naturellement dans le mouvement cyberpunk
comme le prouve la série.
esm.: ouais c’est vrai que dans Count Zero y en avait pas du mysticisme. Lain a tout inventé…
le CP a toujours exploré les thèmes de la technologie (qui n’a toujours pas réussi à améliorer l’humain) et les thèmes religieux / mystique. Voire même de messie.
la techno et le divin en gros. Deux piliers du cyberpunk voire même de la science-fiction en général
alors dire qu’on retrouve jamais de mystique dans le CP je suis pas d’accord.
tranx.: hmm ok. Faut voir sous quel angle c’est pris aussi. Je connais pas count zero par exemple
mais en sf générale ces deux piliers sont la plupart du temps bien distincts
souvent même en opposition
dans lain le Divin est indissociable du technologique
il n’y a qu’un seul pilier technodivin
esm.: count zero c’est carrément les divinités voodoo qui se baladent sur le net.
tranx.: je dis pas que lain a tout inventé m’enfin y a un très bon agencement des thèmes
faudrait que tu mates ça esm ça vaut le coup.
lvdz.: ouais enfin voilà lain c’est un cran au-dessus à ce niveau-là
Et sans vouloir jouer les troubles-fêtes le cyberpunk n’est pas lié au divin
Les gros thèmes du cyberpunk c’est la technologie, les corporations et le complot
C’est pas un bouquin de gibson qui va changer ca, même si c’est gibson ….
Donc en gros dire que le divin c’est un pilier du cyberpunk désolé mais là c’est n’importe quoi
No offense meant mais sur le mur on est des gars rigoureux
Désolé si j’ai été rude
mais j’ai pas dis qu’il n’y avait qu’une oeuvre qui parlait de ça
Mais je ne suis toujours pas d’accord de dire que c’est un thème majeur
Et Do androids dream of electric sheep ce n’est pas une réflexion sur Dieu malgré les références.
esm.: ouais bon ok alors ça dépend de la définition de majeur alors
mais je trouve que c’est un thème quand même assez récurrent.
tranx.: dans shadowrun et matrix le divin est juste un prétexte, du décor quoi.
Neo est the one mais c’est totalement heathen, y a pas de connexion divine.
esm.: hein c’est qu’un décor dans Shadowrun???
Eacil.: Les histoires de messie, etc dans le CP sont liés au fait que le rapprochement des humains via le cyber permet par le talent (hacker) de créer virtuellement (mais concrètement, finalement), les phantasmes mystiques. Après, le blabla (comme dans Comte Zéro), c’est qu’une interprétation de l’inconnu. Ce sur quoi s’implante aisément toute religion.
La Singularité est pour moi, la meilleure définition de Dieu.
tranx.: je suis pas vraiment d’accord sur Dieu = singularité mais bon c’est défendable
enfin disons que je vois ce que tu veux dire mais que je n’adhère pas
cela dit ça colle bien à la définition de Dieu dans Lain
(je pense qu’Eacil voulait parler plus proprement de l’aspect transcendant de la singularité c-à-d qu’un homme post-singularité est comme un dieu pour un homme pré-singularité)
ce avec quoi je ne suis pas d’accord
« comme un dieu » ne peut pas vouloir dire Dieu (du monothéisme)
c’est au mieux un dieu (du polythéisme)
car Dieu est, par définition, Unique, alors que l’homme, même post-singularité, est multiple
mais je dirais plutôt qu’un homme post-singularité est pour l’homme pré-singularité
comme un mage très puissant pour un paysan de med-fan.
Eacil.: C’est exactement ça, le truc post et pré-singularité. Mais il faut rajouter que je conçois
la Singularité dans son évolution constante, ainsi un « post-singularité » peut revivre une Singularité selon ses nouveaux paradigmes. Et le Dieu de lain n’est pas cette incarnation. C’est juste un nerd un peu plus doué et en avance sur son temps.
tranx.: je comprends pas bien le concept de revivre une singularité (ou la Singularité?)
(en fait tu veux dire qu’il n’y a pas une mais des singularités et qu’une espèce post-singularité verra elle aussi une Singularité ? Je suis d’accord : l’homme lui-même est une espèce post-singularité > après les primates.)
et Eiri (Dieu) n’est pas un nerd c’est quand même le concepteur du protocol 7
sans la boucle qu’il a introduit dans le protocole il n’aurait jamais pu acquérir ce statut
le protocole 7 n’est pas open source.
Eacil.: La Singularité est juste un seuil pour plonger dans un état de non-compréhension.

Edit : Retour et précisions.

esm.: après relecture du poste récapitulatif de Tranx, je souhaite corriger ma position
le divin nest PAS un pillier du CP, ok on est tout à fait d’accord. C’était un mauvais choix de mot.
par contre le mysticisme, j’en démordrai pas
il est présent dans la plupart des oeuvres que j’ai lu.
tranx.: OUI. là on est d’accord. on avait juste un problème de vocabulaire.
mysticisme parce que tentative d’expliquer l’inconnu
un paysan du moyen-âge (encore lui) décrivant l’électricité
beaucoup de mysticisme dans le CP car beaucoup d’inconnu lié a l’explosion technologique et au secret (cf complot)
par contre peu de divin parce que Dieu n’existe pas (cf technologie + corporations).
lvdz.: Voila, de là à dire que le mysticisme est un pilier …
Je reste sceptique.
tranx.: ben dès qu’il y a tentative d’explication de l’inconnu
par pure expérimentation (sans outils) il y a mysticisme
donc fatalement c’est récurrent en CP
(la philo est un outil, comme la science ou même le dogme religieux puisque le mystique privilégie l’introspection pour atteindre la vérité, en rejetant le dogme)
enfin bon « pilier » est un terme trop fort; « thème récurrent » est plus adapté
en fait pour moi le mysticisme (en CP uniquement) découle du thème technologique
comme le complot découle finalement du thème corporatiste (et autres puissances gouvernmentales ou non)
Il y a donc 2 « vrais » piliers CP (tout le reste en découle) :
technologie et puissantes organisations (corpos, mafias, gouvernements)
Ces 2 piliers sont bien entendu liés : la technologie est rendue possible par la recherche financée par les grandes organisations. Les grandes organisations se maintiennent et oppressent la population grâce à la technologie. La population asservie et tenue dans l’ignorance développent les phantasmes de complot et de mysticisme.
donc les thèmes complot et mysticisme découlent des piliers corporatistes et technologiques.

Customize Interface


Pour ceux qui désirent coplandiser leur interface, histoire de se croire un peu plus dans le wired (mais toujours sous Windows), vous trouverez un skin à cette adresse.
Ahhhhhh !!! Un skin !!! Bouuuuuuuuh ! Vilain facho !!
Hmm désolé pour cette blague à la con.
Bon alors bien sûr vous aurez pas des icônes qui se baladent toute seules sur l’écran et l’ordinateur ne vous souhaitera pas non plus une bonne nuit en vous appelant par votre prénom d’une voix caressante. Mais bon. Vous n’avez pas de pyjama-nounours de toute façon.
(Pour ceux qui se posent la question : NON, vous ne pourrez pas non plus effacer la mémoire de vos amis grâce à ce skin. Désolé.)

Suite de ma fiche sur Lain (Updated!)

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A propos des Knights of Eastern Calculus : « Les Knights ne sont pas de simples crackers, nous dit Taro, ils se battent pour une vérité unique. »
Les Knights sont représentés pas trois personnages récurrents qu’on pourrait voir comme leur délégation tokyoïte. Examinons-les d’un peu plus près :
*Un otaku/geek obèse, constamment devant son écran, vivant dans une piaule minable et se nourrissant de junk food.
*Une mère de famille qu’on imagine utiliser le Wired occasionnellement et/ou pour jouer avec son fils.
*Un homme d’affaire dont le Wired est avant tout un outil de travail.
Trois représentants des Knights, trois manières d’utiliser le Wired qui recouvrent finalement les utilisations du net répandues dans n’importe quelle population.
Au cours de la série on aura la chance d’apercevoir d’autres membres des Knights, venus d’autres pays. Ces images, passées à la télé (à l’occasion de la divulgation par Lain des informations personnelles de tous les membres de cette confrérie et des ‘suicides’ qui en ont découlé) sont troublantes. Les visages ne sont jamais visibles, les vêtements sont quelconques, les lieux anonymes. Même les rumeurs qui courent donnent l’impression que les Knights peuvent être n’importe qui. Ce qui est en fait la stricte vérité.
Là où je veux en venir c’est que les Knights, « plus que de simples crackers », représentent en fait tous les utilisateurs du wired. Les Knights c’est Mr Tout-le-monde dès lors qu’il se cache derrière un écran. Les Knights c’est Anonymous, c’est 4chan, ce sont tous les trolls de tous les forums du monde. Les Knights c’est vous et moi, c’est la face cachée d’internet. Leurs revendications ce sont celles de notre côté obscur, celui qui se régale de chaos. Ils rejettent règles, barrières, lois, tabous, interdits et secrets, rejettent la société.

Tout le monde est connecté.

A propos de la famille de Lain : Le père de Lain travaille pour les laboratoires Tachibana. Il est l’un des concepteurs du protocole 7. On le voit aux côtés de Masami Eiri sur une photo divulgée lors de l’enquête sur le suicide de ce dernier. Son rôle c’est de surveiller au plus près le développement de l’avatar Lain et, si besoin est, de la guider.
Mika, la soeur de Lain, a pour moi la simple (mais vitale) fonction de fusible. La quantité d’informations humaines ou non-humaines assimilées par Lain lors de son évolution est titanesque. Ce sont des millions de mémoires, virtuelles ou non, qui transitent par elle. Afin d’éviter le trop-plein (surtout au début de sa « croissance », lorsqu’elle n’est même pas consciente de sa nature), une partie de cette information est redirigée vers sa soeur, laquelle se retrouve
victime d’hallucinations (qui sont en fait les visions de sa ‘soeur)’ ou bien forcée d‘interpréter des messages qui ne lui sont pas destinés (« Accomplis la prophétie »). Mika perdra très tôt la raison. Elle sera remplacée (exactement comme on remplace un fusible) par une autre version d’elle-même qui durera un peu plus longtemps (une version améliorée ?) mais finira quand même dans la semoule : à la fin de la série, Mika se prend pour un fax (« bîîîîp, bîîîîp, bîîîîp, transmission commencée, bîîîîp, bîîîîp bîîîîp… »).

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Réaction d’Eacil au post précédent (via le forum du Cafard Cosmique) :

J’aimerais remarquer que dans ta liste des trois Knight, aucun n’est finalement intimement lié à la matrice réel/virtuel. C’est surprenant, pour des hackers surdoués, ils ne possèdent pas cet équilibre intime avec la matrice globale et sans doute est-ce la cause de leur défaillance ainsi que de cette conception du chaos qui n’est que la résultante d’une légitimité erronée. Ils sont forts, sûrement par la répartition des tâches, la moyenne étant équilibrée, les parties, pas du tout.
L’hikikomori obèse ne connaît la réalité que par le biais d’une version digitalisée, la mère de famille n’est finalement pas très impliquée dans le wired, une homme d’affaire qui ne connaît que le business. Il n’y a que Lain pour interagir totalement avec les deux plans, est au plus près de cette intime compréhension des choses et de leurs relations. L’extermination des Knights est une façon de poser la problématique de la morale, d’une non appropriation d’un domaine qu’on ne connaît pas parfaitement. La fusion oui, mais pas pour permettre les trolls, la destruction par l’égoïsme. La fusion pour permettre l’amitié (incarnée par Lain et Alice), l’extension de l’affection aux autres (une gestalt ?). A rapprocher du rapport fusionnel dans le charnel, sans doute la seule façon de dépasser ce mythe seulement physique par l’apport de la partie manquante, psychique. Autrement dit, la fusion pour la vérité, pas celle des Knights mais l’honnêteté, la sincérité, en assumant les deux côtés d’une pièce.

D’ailleurs, la destruction de Dieu, c’est le refus de s’embourber dans cette logique de l’Ego, la logique de causalité du pourquoi, pourquoi, pourquoi, cette base de l’information qui devient pouvoir, Lain tuant Dieu par le moyen que l’on sait lui jette une sorte de division par zéro dans sa logique centripète. Seul triomphe, donc (redite), un équilibre parfait non coupé d’une réalité ou de l’autre (virtuelle) qui a pour seul but l’évolution vers un « bonheur » plus absolu, ce vers quoi doit tendre la philosophie, semble-t-il.
Résolution de l’altérité, de LA Vérité, du bonheur, ça en fait des choses pour une série de si peu d’épisodes !

Une idée du bonheur ?

Réponse de Tranxenne
:

Ton analyse sur la signification de la présence des Knights dans Serial Experiments Lain est très pertinente. Je n’avais jamais envisagé le problème sous l’aspect moral. Je reviens sur quelques points.

Tu dis que les Knights ne sont finalement pas très lié au réseau. Il est clair qu’ils n’ont pas avec le wired la relation privilégiée que Lain possède mais je pense qu’ils sont plus actifs qu’on ne le voit objectivement. Indices : l’homme d’affaires dédaigne sa secrétaire (pourtant fort aguichante) pour rejoindre le clan Knights online (« A quoi va-t-on jouer maintenant ? »). La mère de famille reçoit des composants estampillés Knights par colissimo (composants qu’elle s’empresse de détruire – dans l’évier de cuisine ! – une fois saturés de données compromettantes). Quant à l’hikikomori (j’avais oublié l’existence de ce terme) il se déplacera quand même pour liquider l’aspirant Knight trop gênant (car trop peu discret ?).
Même s’ils connaissent son existence et arrivent à l’influer jusqu’à un certain point (la création de la ‘fausse’ Lain), les Knights n’ont pas un accès direct au wired du protocole 7, terrain de jeux de Lain et d’Eiri. La preuve : il utilisent encore du hardware (les noobs :p). De cette façon, ils n’ont pas la possibilité d’interagir dans les deux mondes (et la tentative maladroite de l’aspirant Knight pour relier les deux sera considérée au mieux comme du ‘bricolage’, au pire comme un blasphème envers Deus (Masami Eiri) et sévèrement punie.)
Cela reste un point mineur de ton argumentaire.

Là où ça devient très intéressant c’est quand tu introduis le concept de morale dans ta vision du ‘Nouveau Monde’ virtuel. Comme je le disais dans la première partie de cette fiche « l’ordinateur est devenu un jouet et le virtuel un nouveau terrain de jeux avec des règles encore à définir. » Mais il n’y a pas que les enfants qui investissent ce terrain de jeux. Ou alors les Knights (et tous les adultes qu’ils représentent) sont de grands enfants. Capricieux, cruels, égoïstes…
Lain lutte contre ces tendances. Je ne m’étais absolument pas rendu compte que sa quête d’une véritable amitié, son besoin d’affection, son trop-plein d’amour caractérisaient en fait cette lutte à la fois contre le cynisme et l’autoritarisme des adultes et contre la cruauté et l’égoïsme des enfants. Privilège de l’adolescence : on n’est plus un enfant ; on n’est pas encore un adulte. Ah ! L’idéalisme de la jeunesse. C’est sans doute à cet âge intermédiaire que l’idée de bonheur est la plus claire. L’avènement d’un équilibre parfait entre réel et virtuel permet à cette idée de perdurer.

Une idée saugrenue : le monde idéal de Lain c’est celui où elle n’existe pas, du moins pas en tant qu’être possédant un corps. Résurgence de la thématique du suicide qui hante Lain tout au long de la série.
Dans le dernier épisode, tout à la fin : Lain n’existe plus dans la mémoire des autres (donc elle n’existe plus du tout), l’adolescent ne s’est pas suicidé, la petite fille n’a pas été tuée en pleine rue, les enfants jouent à pierre-papier-ciseaux plutôt qu’être scotchés à leur ordinateur de poche, Masami Eiri décide de démissionner, les hommes en noir bossent pour une compagnie d’électricité (belle ironie), Alice s’est trouvé un bon mari. Tout le monde est heureux et Lain n’existe pas, du moins elle n’est plus présente physiquement mais reste omniprésente dans le wired. Le sentiment d’amitié qui la relie à Alice lui permet d’exister, même si celle-ci l’a oublié.

Un point intéressant qui m’est venu en lisant ton commentaire : La Trinité formée par Lain, son père et Masami Eiri. Le père Iwakura est en effet le créateur de Lain en tant que personne, qu’avatar, Eiri étant plutôt responsable du protocole lui-même. On a donc le Père, la Fille et le Saint-Esprit (incarné – ou plutôt désincarné – par Masami Eiri).
On trouve tout au long de l’anime énormément de références au christianisme, comme ce plan où Lain se trouve à un carrefour entre deux routes virtuelles, telle un Christ au centre de la croix, ou bien l’apparition de son image dans les nuages. Lain est clairement une figure christique.

Je suis cependant d’accord sur ta vision de Deus en tant qu’Ego absolu. Par son suicide même Masami Eiri refuse en fait de mourir. Il s’enorgueillit de ses adorateurs, les Knights. Lain détruisant Deus, est-ce une image du Christ rejetant la Trinité, en tout cas le Saint-Esprit ? Refusant donc l’idée d’un Dieu agissant, lui préférant l’idée d’un Père qui ne juge ni n’intercède, un Dieu contemplateur, humble et bon ? Le Dieu du Nouveau Testament plutôt que celui de l’Ancien, en fait.

A creuser (mais aussi à réinterpréter car le Saint-Esprit n’est pas seulement la force active de Dieu mais aussi l’Amour entre Père et Fils).

(J’ai reposté cette conversation ici pour deux raisons : ça en intéressera certains qui ne sont pas des habitués du Cafard et puis j’essaye de regrouper tout ce que j’ai écrit/échangé sur cet anime en vue, peut-être, d’un site dédié, en tout cas pour faciliter mes recherches. Et depuis quand je me justifie, moi ?
Si la discussion évolue, ce dont je ne doute pas, je continuerai d’éditer ce message plutôt qu’en poster de nouveaux, par souci de clarté. En cliquant sur le tag Serial Experiments Lain ci-dessous, vous aurez directement accès à TOUT ce que j’ai posté sur cette série)
.

Serial Experiments Lain

Je sais bien que ça ne va pas intéresser plus d’une personne et que les autres ne vont même pas lire le truc mais voilà je suis tellement content de cette fiche que j’ai rédigée pour le Cafard Cosmique que je ne résiste pas plus longtemps à l’envie de vous la claquer là, telle quelle ou presque.

Réalisateur : Ryutaro Nakamura
Design original : Yoshitoshi ABe
Scénariste : Chiaki J. Konaka
Producteur : Yasuyuki Ueda
Studio : Pioneer LDC
Genre : Cyberpunk

Present day… Present time…

Lain est une adolescente rêveuse et introvertie. Elle n’a pas beaucoup d’amis. Son soudain engouement pour le wired (à peu de choses près l’internet qu’on connaît aujourd’hui) lui permet l’exploration de mondes virtuels où elle trouvera des réponses sur le réel, sur l’existence et aussi sur elle-même. Ses échanges et son historique lui apprendront à se connaître et à se reconnaître, à s’accepter, enfin à s’accomplir.

Serial Experiments Lain est conçu comme une série d’expérimentations et de questionnements, d’où son nom.

*Expérimentations sociales.
A sa sortie sur les écrans au Japon, Serial Experiments Lain n’a pas laissé indifférent. Déjà par la singularité de sa diffusion : le 6 juillet 1998, à 1h15 du matin, alors que les chaînes locales n’émettent plus qu’un écran brouillé, les rares insomniaques qui avaient oublié d’éteindre leur moniteur branché sur TV Tokyo ont pu entendre une voix rigolarde asséner ces mots : « Present day. Present time. Ahahahahahaha ». Une des séries les plus révolutionnaire de sa génération débutait.
Serial Experiments Lain a également bousculé bien des conventions : avant son arrivée il était impensable au Japon de parler de suicide ou de drogues dans un anime.
Yasuyuki Ueda, le producteur de la série, a confié en interview avoir voulu créer une série qui serait interprétée différemment au Japon, aux Etats-Unis ou en Europe. Il pensait que les différences culturelles favoriseraient la diversité des opinions et permettraient d’enrichir le dialogue.
Ueda a également conçu Serial Experiments Lain comme un projet multimédia : devaient paraître au même moment la série, un manga et un jeu vidéo (sur Playstation). Seul le manga n’aura finalement jamais vu le jour.

*Expérimentations graphiques.
Visuellement c’est troublant. Ce n’est pas la qualité du trait ou la quantité de détails qui dérangent mais au contraire un dépouillement prémédité. La luminosité des tons ainsi que l’économie de détails donnent au dessin une clarté visuelle touchante et une simplicité désarmante. S’y ajoutent, en compensation, tout un monde d’éléments surréalistes : ombres « tâchées » de points rouges ou bleus, reflets « vivants » qui interpellent le spectateur et lui posent la question de la nature du réel. Ce choix graphique épuré allié à la relative lenteur de la série lui confère une atmosphère onirique, insistant sur cette question très importante de la réalité.


Lain et sa collec’ de disques dur externes, prélude à la globalisation de sa mémoire.

*Expérimentations sonores.
Le côté onirique est encore relevé par les musiques, de toute beauté. D’abord, on n’entend jamais deux fois le même morceau. Chaque air possède sa scène, la porte et lui donne une saveur. Outre de grands thèmes (réunis sur une bande originale) qui vont de la chanson pop entraînante au jazz le plus barré, en passant par du gros riff de guitare saturée, on a aussi une quantité délirante de petits airs envoûtants, souvent réalisés au synthé mais pas uniquement, en tout cas toujours complètement trippant (ceux-là sont disponibles dans le bootleg de la bande originale). Les écouter est un vrai régal, avec ou sans l’image.

*Expérimentations scénaristiques.
Les épisodes sont appelés layers, ce qu’on peut traduire par couches ou calques (comme sur photoshop). Chaque couche propose un nouveau paradigme tout en donnant certaines clés de l’épisode qui l’a précédé. On erre dans des labyrinthes scénaristiques qui s’enchâssent sans jamais être sûr qu’on en a quitté un seul. Salles et corridors se déroulent, se déploient avec pour seul repère la gamine Lain Iwakura comme point focal de rencontre et surtout de fusion entre les différentes thématiques, les différents labyrinthes. Les thèmes sont donc fort nombreux, le récit part dans tous les sens et on ne comprend souvent plus rien mais c’est parce que les créateurs de Serial Experiments Lain ont voulu explorer toutes les pistes qu’ils ont imaginé sans en abandonner une seule, quitte à laisser ensuite de nombreuses questions sans réponses.
Les thèmes principaux abordés par la série sont :
* Nature de la réalité
* Existence et identité
* Troubles mentaux et quête de soi
* La technologie et son rapport à l’individu
* Dieu et la validité théorique de son existence dans un monde virtuel

Le tout est brillamment ramené à la problématique de l’adolescence et de l’amitié. Souffrance, confusion, doute, espérance, des émotions fortes ressenties par des jeunes égarés dans un monde où l’ordinateur est devenu un jouet et le virtuel un nouveau terrain de jeu avec des règles encore à définir.

Tout le processus réflexif présent dans Serial Experiments Lain serait impossible sans des connaissances et des références, aussi la série s’appuie sur les travaux de scientifiques ou de sociologues reconnus et parfois controversés, voire d’écrivains ou d’artistes. Les layers prennent parfois l’allure de documentaire. Ainsi sont évoqués les travaux de John C. Lilly et de Timothy Leary sur la conscience humaine, l’engagement de Vannevar Bush sur le projet Manhattan ou le projet Majestic 12 (sur l’affaire Roswell) et son invention de l’analyseur différentiel (un ordinateur analogique), les études de Schumann sur les champs magnétiques terrestres, les théories de Ted Nelson sur l’internet ou les écrits de Douglas Rushkoff et Cordwainer Smith. Entre autres.
Ajoutons à cela des allusions à Alice aux pays des merveilles, à Marcel Proust, à la franc-maçonnerie, à Carl Jüng, etc, etc.
Ces références ne sont pas gratuites, elles permettent aux auteurs d’étayer leur propos et de canaliser leur imagination. On se retrouve à regarder de la prospective et plus de l’animation.

« Peu importe où tu vas. Tout le monde est connecté. » – Lain Iwakura

/ ! \ Dans cette fiche je me propose non seulement de présenter la série à ceux qui ne la connaissent pas mais aussi de pousser l’analyse et la réflexion sur les thèmes qui y sont abordés. La richesse de cette série fait qu’après plus de cinq années et d’innombrables visionnages j’y trouve toujours matière à réflexion, sur nos vies, sur nos futurs, sur nos possibilités. Aussi, pour ceux qui n’ont jamais vu cet anime je vous recommande fortement de ne pas lire ce qui va suivre car les spoilers abondent. Louez cette série, regardez-la une fois, plutôt deux fois car la première est très déroutante, puis revenez ici.

Au début du générique, un écran blanc sur lequel viennent s’afficher quatre mots énoncés par une voix rigolarde : Present day… Present time. S’ensuit un rire sardonique et jovial. Ceci pour bien nous faire comprendre que Serial Experiments Lain n’est PAS de la science-fiction. Cela se passe ici, à notre époque. Nous avons toutes les cartes en main.

L’anime s’ouvre sur le suicide d’une adolescente. La jeune fille en uniforme de collégienne saute du toit d’un immeuble. Elle va s’écraser au milieu des caisses de bières et des néons d’un quartier populaire, attroupant les passants sortis pour faire la fête.
Son cartable est toujours sur le toit.

Ecran blanc. Une porte s’ouvre. Lentement. Une adolescente descend, cartable sur le dos, les marches du perron. Tout est si lumineux. Lain descend silencieusement la rue. Elle part pour l’école. On entend déjà le bourdonnement des fils électriques tendus en désordre, morcelant le ciel. Ils semblent appeler quelqu’un, vouloir dire quelque chose.

Au collège, Lain apprend qu’une de ses – rares – amies a reçu un mail de Shiza Yomoda. Cela l’a profondément choqué, la jeune fille s’étant suicidée quelques jours plus tôt. Ses autres amies tentent de la consoler en lui assurant que ce n’est qu’un canular. En rentrant chez elle ce soir-là, Lain allume son ordinateur, chose qu’elle ne fait d’habitude jamais, pour découvrir qu’elle aussi a reçu un mail de Shiza. La jeune fille y explique qu’elle n’a jeté que son corps. Que son esprit est toujours là, dans le wired. Qu’elle y a rencontré Dieu.


Dès lors, Lain, encouragée par son père, va se plonger dans le monde de l’informatique, ses réseaux, ses potentiels et ses dangers. Au fur et à mesure de ses pérégrinations virtuelles, Lain réalise qu’elle n’est pas ce qu’elle croyait être, que ses parents ne sont pas ceux qu’ils n’ont d’ailleurs jamais prétendu être, et que ses amies ne sont peut-être même pas ses amies. Elle réalise que certaines personnes qu’elle ne connaît pas la connaissent très bien. Elle s’en inquiète. Elle se voit suivi par deux individus en costume noir d’allure plus que suspecte, sans pouvoir déterminer s’ils sont là pour la protéger ou pour la menacer. Elle ne sait pas que penser.

Outre ces accès vraisemblablement paranoïaques, Lain découvre qu’on la connaît sous d’autres personnalités. Elle se découvre agressive ou lascive. Ses autres moi lui font peur. D’ailleurs, dit-elle, « Ce n’est pas moi. Il n’y a pas d’autre moi que moi. » Mais ces paroles résonnent dans le vide car Lain est toute seule : ses amies la fuient.

C’est en cherchant les réponses aux questions qu’elle se pose sur elle-même et le monde qui l’entoure qu’elle apprendra à s’accepter, à modifier son environnement, à échanger avec les autres, à faire du monde son monde. La recherche et le tâtonnement sont nécessaires pour découvrir son identité et comprendre les raisons de sa propre existence.

Lain découvre très tôt que ses parents ne sont pas vraiment ses parents, même si elle ne peut pas se rappeler de ce qu’elle connaissait avant eux. En fait, elle ne peut se rappeler de rien : ni dates d’anniversaire, ni souvenirs de familles, ni aucune « foutaise » de ce genre.

Lain a également des ennemis. Les Knights sont des hackers mais leur objectif reste très vague. Leur principal méfait (outre attenter à sa vie) fut de connecter ensemble un serveur de jeux en réseau de type kill’em all (les auteurs ont empruntés certaines textures du jeu DOOM pour ces scènes) et celui du réseau de jeux d’un jardin d’enfants, donnant lieu à certaines des scènes les plus choquantes de la série comme celle où un adolescent tire en pleine rue sur une petite fille en hurlant : « Crève ! Crève ! Crève ! »
Les Knights semblent chercher, à l’instar des laboratoires Tachibana, à accélérer la fusion entre monde réel et virtuel. Cependant ils refusent toute forme de régulation exercée sur le réseau, y préférant un chaos créateur et sans règle. C’est pour cela qu’ils deviennent l’ennemi mortel de Lain elle-même.

« Je suis Dieu » – Masami Eiri.

Masami Eiri est un scientifique travaillant pour les laboratoires Tachibana, lequels concoivent des ordinateurs, les Navi (pour navigateurs web), très populaires car très performants. Allant de l’ordinateur de poche (très pratique pour surfer pendant les cours) au Navi destiné à la recherche, en passant par le desktop classique pour la maison ou le bureau, les laboratoires Tachibana sont présents sur toute la gamme d’ordinateurs.
Leur projet le plus récent et le plus ambitieux est la mise en place d’un nouveau protocole de communication, le fameux protocole 7. Le protocole 7 permettra l’accès au wired sans interface matérielle, donc sans hardware, directement par la pensée en utilisant les ondes cérébrales propagées par la résonance Schumann.

En fait, ce projet en est déjà au stade de l’implémentation fonctionnelle et ce à l’insu des populations et gouvernements concernés. L’augmentation des troubles mentaux et les manifestations qui en découlent (meurtres, suicides…) sont en fait dues à l’inaptitude de la plupart des gens à assimiler l’intrusion d’un réseau ouvert dans leur conscience et d’accepter de devenir ce qu’ils sont (car dans le wired du protocole 7 il est possible de se métaphoriser, c-à-d de devenir son avatar). Bref c’est toute une forme d’inconscient collectif qui est mis à disposition des consciences grâce aux laboratoires Tachibana.
(En cela, l’apparition d’un extra-terrestre roswellien ne doit pas désarmer le spectateur : en tant que rumeur persistante, l’existence d’extra-terrestres est devenue un mythe possédant une existence propre dans la psyché humaine. Il a donc sa place dans la réalité de Lain, qui est toute faite de virtuel.)

Masami Eiri, licencié par son employeur pour avoir introduit une boucle non-autorisée dans le code du protocole, se suicide peu après en se jetant sous un train. La boucle qu’Eiri a inclus dans son code lui permet d’uploader sa mémoire au cœur même du réseau. Ainsi devenu omniprésent et omniscient, occupant les mémoires de chacun, Masami Eiri s’est proclamé Dieu dans un monde qui ne croit plus qu’en la science.

Quant à Lain, elle réalise qu’elle est capable de manipuler les mémoires des gens ou de modifier le réel par le biais du virtuel. Ce n’est pas un pouvoir. C’est une fonction. Car Lain est un software. Un programme catalyseur destiné à superviser les effets secondaires de l’implantation du réseau wireless. Quand elle upgrade son Navi elle upgrade également son potentiel et sa conscience, son emprise sur le monde.
En effet si son accomplissement en tant qu’être pensant passe uniquement par le wired c’est parce que Lain n’est pas humaine. Sa forme n’est qu’une convention, une information. C’est aussi parce que, par elle mais à ses dépends, le monde réel et le monde virtuel sont en train de fusionner. Lain est un produit des laboratoires Tachibana. Elle devient la gardienne consciente d’un monde en pleine mutation.

Close the world – Open the next

Serial Experiments Lain c’est un constat. Celui de la virtualisation toujours accrue de nos rapports avec le monde et avec les autres, voire avec nous-mêmes. C’est une synthèse, un regard sur le chemin parcouru en informatique et en cybernétique. C’est enfin une question : Qu’est-ce que l’on veut faire maintenant ?

J’attends vos commentaires, réflexions, interprétations.
N’hésitez pas à visiter ces deux sites très complets sur la série (le premier surtout) :
Thought Experiments Lain
Religion Virtuelle

Cyberia Mix

Make me mad

Make me sad

Make me feel alright


Present day. Present time.